Aurore (Dans l'étable nuiteuse)
Aurore
Dans l'étable nuiteuse encor les boeufs s'ébrouent,
Etirent lourdement leurs membres engourdis,
Réveillés tout à coup par un coq qui s'enroue
Et dont le cri strident semble un poignard brandi.
Trempé d'aube, dehors, le fumier resplendit
Contre un mur délabré qu'une lucarne troue,
Parmi des bois pourris, des socs, des vieilles roues,
Et lance vers le ciel des parfums attiédis.
Cernant une écurie ouverte au toit de mousse,
Qu'emplit un vribrement nuageux d'ombre rousse,
Du purin, noir brocard, s'étale lamé d'or,
Où fouillent du grouin activement les porcs.
Et dans la paille humide et qu'ils ont labourée
Le soleil largement vautre sa chair pourprée.
Par l'Amour, 1904