Les blés
Les blés
La somptuosité du soleil écroulé
Froissant à larges plis sa moire cramoisie,
La pâleur de la lune au loin qui s'émancipe,
Et là-dessous la mer écarlate des blés.
Reflets et chatoiements, clartés contradictoires;
Les chardons sont d'émail nuagés d'or soyeux,
Un damas lumineux pare le flanc des bœufs,
La mare s'embellit de roses illusoires.
Une odeur de bétail veloute l'air du soir;
Tout resplendit, les murs byzantins d'une abside
Et, caché aux remous des blés que le vent ride,
Le village enfumé semble un pourpre encensoir.
Mais la lune à jailli, bleuet hors d'une gerbe;
Les rayons du couchant tremblent violacés
Auréolant, debout dans leur orgueil superbe,
Les bruits au long des chaumes entassés.
Et l'océan des blés plus doucement frémit...
Que nos corps consumés à l'égal de la terre
Reposent par les champs comme au bord d'un cratère
Dan l'ardente torpeur des épis endormis.
Par l'Amour, 1904