Le nain
Les baisers
Le nain
Sur l'escalier de marbre où le couchant se joue
Des groupes enlacés s'attardent en l'odeur
Des jets d'eau frémissants et des jasmins en fleur;
Les belles vont rêvant, l'éventail à la joue;
Et le nain blottissant dans l'ombre sa laideur,
Sa guitare aux genoux, lui, triste, qu'on bafoue
Pour son échine en dôme et sa flasque bajoue,
Brûlant, meurtri, hagard, apaise son ardeur
En caressant du doigt, en pressant sur sa lèvre,
Chair douce et accueillante au désir qui l'enfièvre,
Une rose en bouton: épaules, seins nacrés...
O tendresse et pitié qui s'émanent des choses,
Loin des rires cruels, des dédains acérés,
Sous les baisers du nain s'est ouverte la rose!
Par l'Amour, 1904.