Ballade
Cendres et pourpres
Ballade
L'heure où quelque fantôme ailé
Sous la lune incertaine flotte,
De son mol argent linceulé;
L'heure où sur les mares pivote,
En un vieux rythme de gavotte,
La flamme des fadets. - Désir
Eternel en la nuit sanglote
Et lui verse son élixir.
Chaque huis est noir et clavelé.
Veillant auprès d'un feu de motte.
La Belle du roi de Thulé
Dévide son rêve et marmotte.
L'ombre à sa vitre d'or chuchote
Où la lune de bleu saphir
Verse sa clarté qui tremblote,
Grisante comme un élixir.
Le beau récit ensorcelé
Que ressasse la voix falote,
Cri si langoureux roucoulé
Des crapauds et de la hulotte,
Plus tendre qu'un chant de linotte.
Voici l'heure où l'obscur soupir
Des bois, des gués, des joncs clapote
Et nous verse son élixir.
Envoi
Prince des songes, dans ta grotte,
Reçois-nous à ton bon plaisir,
Sujets soumis à ta marotte,
Mais verse-nous ton élixir.
Novembre 1900
A travers le voile, 1902