Marie Dauguet

(Je marchais dans la nuit...) Au bord de l'ombre

Au bord de l'ombre

 

(Je marchais dans la nuit...)

 

 

Je marchais dans la nuit livide

Et m'en allais je ne sais où;

Des ombres rampaient à genoux

Autour de moi dans l'herbe humide.

 

Moirant l'eau d'un étang noirci,

A peine un peu de clarté verte,

Une blessure à peine ouverte

Au flanc du couchant obscurci.

 

Je marchais triste dans ce vide

Du silence sous mes pieds nus,

Coeur dépouillé redevenu

La cendre de la lande aride.

 

A l'horizon, rien que cette eau,

Qui verdoyait comme une plaie,

Sous le frisson des oseraies,

Cette eau morte comme un tombeau.

 

Et quelqu'un qui m'avait aimée,

Mais que je ne devinais plus,

Etreignait d'un geste confus

Ma main. Et sa main consumée

 

Entre mes doigts s'amollissait.

Ce pays que l'oubli ravage

Et ce lac au fiéleux mirage,

Dis-moi, mon coeur, qu'est-ce que c'est?

 

L'abîme trouble où tu voyages?

 

 

A travers le voile, 1902



22/03/2013
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