Marie Dauguet

L'homme à la source - Au bord de l'ombre

Au bord de l'ombre

 

L'homme à la source

Sur un dessin de R.

 

Et je t'ai vu, mon coeur, tout au fond de moi-même,

Tel un spectre noirci, les yeux voilés de rides;

Tel un charme pierreux sous des rayons arides,

Où plus rien ne verdit des épis que l'on sème.

 

***

 

Te voici, poussière, qui dans le vent essaime,

Fontaine sans murmure à la margelle vide,

Pour avoir reflété trop de clarté perfide

Et le fantôme vain de tout ce qui nous aime.

 

L'heure de vérité autour des dalles pousse

Et nulle fleur n'y croit que des chardons d'acier.

Il n'est plus temps d'aller, les pieds nus sur la mousse,

 

Plonger à deux la coupe au flot extasié!

Amour, l'onde a quitté le marbre qui se brise

Lasse enfin de mirer ta face de traîtrise.

 

A travers le voile, 1902



23/03/2013
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