(Mon coeur est né sauvage...)
Les heures sauvages
E se tu sarai, tu sarai tutto tuo
Léonard de Vinci
(Mon coeur est né sauvage...)
Mon coeur est né sauvage et seul comme un merle,
Que berça la chanson du vent, subtil orchestre,
Ivre des noirs myrtils dont la forêt s'emperle,
Grisé d'odeur de source et d'haleine sylvestre.
Il est né comme un merle énamouré des fées,
Des songes, de la nue: et suivant à la trace
L'âme errante qui passe ou qu'on sent étouffée
Dans l'arbre et sous la mousse, invisible et tenace.
Liberté des bruits faux, dont tout rêve s'effraie,
Mon coeur dort à l'abri des vertes reposées,
Qu'effleure seul parfois le vol mou d'une orfraie;
Il est né comme un faon qu'abreuva la rosée.
A travers le voile, 1902