(Mouvante yole...) A la prime vère
A la prime vère
(Mouvante yole...)
Mouvante yole,
Pâle viole
Qui détone,
Si languissamment monotone;
Vent sous les aulnes,
Lilas et jaunes,
Voix qui penche
Au roulis mou de chaque branche;
Murmure aux urnes,
Si taciturnes
Qu'ont les cendres,
Qu'à peine le coeur peut surprendre.
Au bord de l'âme
Un peu de flamme,
Mais sans joie,
Noyé en l'ombre qui poudroie.
La cornemuse
S'entourne et muse,
Et miaule
La chouette au tronc d'un vieux saule.
L'instant se pleure,
L'heure après l'heure
Coule, en sorte
Qu'il n'existe rien à ta porte.
Pleure ou te moque,
Coeur équivoque,
En dérive
Vers l'inconnu de quelle rive?
A la primevère
A travers le voile, 1902