O vents harmonieux
O vents harmonieux
Enseignez-moi l'amour, ô vents harmonieux,
Sous les rameaux aux nobles danses,
Les cimes balançant l'azur flottant des cieux,
Des strophes aux justes cadences.
Alors que vous mêlez vos fluides remous
Aux bleus feuillages du mélèze,
Enseignez-moi l'amour des accents purs et doux:
Où l'espace heureux se complaise.
Enseignez-moi l'amour des rythmes qu'inventait,
Sur l'Hymette aux pentes vermeilles,
Aristée, quand la brise en bourdonnant portait
Vers le pin rieur ses abeilles.
Enseignez-moi l'attrait d'un chant vague et songeant,
Semblable dans la nuit verdâtre,
Aux aveux flageolés à la lune d'argent
Par la flûte agreste d'un pâtre.
Sous les astres ouverts comme des yeux de lynx,
Quand l'âme du monde se livre,
Révélez-moi l'accord frais et vert des syrinx,
Dont Pan sur la mousse s'enivre.
Beaux vents harmonieux, vous portez avec vous
Toutes les notes qu'on admire;
Et l'arc-en-ciel des sons, intact ou bien dissous
En votre onde errante se mire.
Vous êtes, ô vents purs, la voix pure ,des dieux.
Tour à tour forte, noble et tendre
Et celui qui, tournant sa face vers les cieux,
Vous écoute, sait les comprendre.
Les Pastorales, 1908