Marie Dauguet

Toussaint (Brumaire)

Brumaire

 

Toussaint

 

Voici les cloches en deuil,

Marteaux clouant des cercueils,

Voici les cloches en deuil.

 

Oh! la pauvre âme isolée,

Au fond de quelle vallée,

Triste, s'en est-elle allée?

 

Loin de nos bras, tant de pas

Pour les conduire au trépas;

Loin de nos coeurs tant de pas

 

Font les spectres quand il vente

Et vont drapés d'épouvante,

Si rapides quand il vente.

 

Dans le clocher c'est l'effroi

Qui commande comme un roi,

Dans le clocher, quel aboi!

 

Horde que le vent torture,

Les guivres à l'aventure

Hurlent au bord des toitures.

 

Mais eux si chers, où sont-ils?

Oh! que nos coeurs sont subtils

Pour deviner où son t-ils?

 

Ils ont glissé sur la pente

Avec des yeux d'épouvante,

Ils ont glissé sur la pente.

 

Oh! la neige comme un drap,

Où semblent s'ouvrir des bras

Qui écartaient des draps!

 

C'est vous, caresses si proches,

Qui brisez pierres et roches

Pour nous revenir si proches.

 

Où donc, pauvres linceulés, 

Vous cherchez tant esseulés,

Par les cieux noirs envolés?

 

Au fond de quelle saulée

Panser vos ardentes plaies,

Au fond de quelle saulaie?

 

Où donc sont emprisonnés

Les cris de vos coeurs brisés,

Où sont-ils emprisonnés?

 

Par où monter ou descendre,

Pour saisir un peu de cendre,

Par où monter ou descendre?

 

Voici les cloches en deuil

Qui ramènent des cercueils

Entr'ouverts à chaque seuil.

 

Voici les cloches en deuil!

 

1er novembre 1900



18/03/2013
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